En particulier dans le contexte des thérapies numériques (DTx) qui complètent les traitements médicamenteux traditionnels.
Cependant, la numérisation des soins de santé aura un effet bien plus important et plus radical sur les modèles commerciaux pharmaceutiques existants : elle privera le modèle de marché pharmaceutique "Share-of-Voice" de son importance et le remplacera par un modèle "Share-of-Data" (partage des données).

Depuis des décennies, le nombre d'interactions et de contacts avec les médecins en tant que prescripteurs potentiels (part de voix) est la pierre angulaire de la stratégie commerciale de l'industrie pharmaceutique. Pour ce faire, de nombreuses entreprises ont mis en place d'énormes forces de vente. Les premières fissures dans cette approche sont déjà visibles en raison de la transition initiale vers des soins de santé personnalisés, ainsi qu'en raison des réglementations imposées qui limitent le nombre de visites de médecins par les représentants pharmaceutiques dans plusieurs pays.
L'émergence d'outils et de solutions numériques - et en particulier les capacités de collecte et d'analyse de données qui y sont associées - réduira encore l'importance du modèle commercial de partage des voix et le remplacera par un modèle axé sur les données.
Quelles en sont les raisons et à quoi ressemblera le nouveau modèle de marché pour l'industrie pharmaceutique ?
Vers un modèle de marché de partage des données
Au cours des dernières années, les résultats de la recherche biomédicale, de l'analyse des cellules individuelles ou de la génomique ont ouvert de toutes nouvelles options thérapeutiques pour de nombreuses maladies. Afin de concrétiser et d'appliquer ces nouvelles possibilités, il est devenu nécessaire de découvrir et de comprendre de manière beaucoup plus approfondie les conditions biologiques et physiques distinctes des patients et de les combiner avec des données relatives au mode de vie, au comportement et à la société afin d'obtenir un ensemble de bio-marqueurs fiables.
Dans le même temps, les outils numériques et l'analyse des données nous ont donné la possibilité non seulement de collecter des données directement auprès du patient (Real World Patient Data), mais aussi de les consolider et de les analyser d'une manière qui permette une prise de décision clinique plus rapide et fondée sur des données probantes, ainsi qu'une prestation de soins personnalisée.
Les décisions thérapeutiques seront de plus en plus motivées par la disponibilité de données personnalisées et de biomarqueurs, ainsi que par l'utilisation d'outils d'aide à la décision clinique. Ces outils seront alimentés par une technologie d'IA validée cliniquement et par les algorithmes correspondants.
Pour l'industrie pharmaceutique, les conséquences sont considérables : les entreprises doivent s'assurer que leurs offres en matière de santé - médicaments traditionnels, thérapies numériques (DTx) ou outils de soins numériques - font partie de ces plateformes d'aide à la décision clinique. C'est ce que l'on appelle un modèle de marché de "partage des données".
L'importance d'une collaboration étroite avec les patients
Les patients joueront un rôle beaucoup plus important et influent à l'avenir. Cela s'explique principalement par deux raisons : premièrement, comme nous l'avons déjà souligné plus haut, la prise de décision clinique sera fondée sur des données relatives au monde réel des patients. Un accès direct aux patients sera donc nécessaire. Deuxièmement, la disponibilité d'assistants et d'applications numériques permettra aux patients de définir un parcours de traitement adapté à leur situation personnelle. Les entreprises pharmaceutiques devront élaborer des modèles entièrement nouveaux pour s'engager auprès des patients à toutes les étapes de leur parcours thérapeutique afin de connaître leurs souhaits et leurs besoins et les offres de soins qui en découlent. Le véritable engagement des patients va souvent au-delà de ce que l'on appelle habituellement la "centricité sur le patient", car il implique que les patients sont une partie inhérente et ferme des activités de recherche et commerciales visant à créer de véritables solutions adaptées aux patients, plutôt que d'être considérés comme un facteur d'influence extérieur.
Construire un écosystème de partenaires
Les soins de santé de demain seront beaucoup plus holistiques qu'ils ne le sont aujourd'hui : ils comprendront un certain nombre de solutions et de services de soins, y compris des éléments tels que les médicaments traditionnels, mais aussi des outils et des compagnons numériques, des thérapies numériques (DTx), des plateformes de décision thérapeutique basées sur des données ou des modèles de soins prédictifs et préventifs.
Si les entreprises pharmaceutiques souhaitent se positionner en tant que fournisseurs d'une telle prestation de soins holistique (plutôt que d'en fournir simplement des éléments), elles doivent construire un écosystème de partenaires de solutions et de services dont les produits et les capacités se complètent.
Implications pour les entreprises pharmaceutiques et recommandations
Il est très probable qu'une grande partie de la création de valeur future se produira en dehors des modèles commerciaux et de marché traditionnels de l'industrie pharmaceutique. Les traitements deviendront de plus en plus individualisés, holistiques et axés sur les données. L'utilisation et le succès d'un régime thérapeutique et de ses composants dépendront de la disponibilité de données réelles sur les patients et de leur analyse, plutôt que de leur part de voix dans la communauté médicale.
À la lumière de ces développements, les entreprises pharmaceutiques devraient adapter leurs chaînes de valeur et leurs modèles commerciaux et réfléchir à la manière d'adopter les approches thérapeutiques émergentes fondées sur les données. Il est donc essentiel de créer et d'intégrer des capacités d'engagement et d'accès des patients et de concevoir des modèles de partenariat pour créer des écosystèmes respectifs.
Enfin, les entreprises pharmaceutiques devraient réfléchir à la manière dont elles peuvent se concentrer non plus sur le produit ou la marque, mais sur la maladie, afin d'être en mesure d'aborder le paradigme émergent des soins holistiques.